Depuis le mois d’avril, les pèlerins se succèdent à grande vitesse sur le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle. Seul ou en groupe, les marcheurs sont des dizaines de milliers à emprunter le GR 65 au départ du Puy-en-Velay. Du jamais-vu ! « Nous sommes sur une bonne dynamique depuis 3 ou 4 ans », indique Emmanuel Boyer, directeur de l’Office de tourisme de l’Agglomération du Puy-en-Velay. Il faut dire que depuis une décennie, les efforts sont conséquents pour donner de l’éclat à cette voie pédestre et spirituelle.
« Le Puy est la capitale du Saint-Jacques en France. Le chemin donne l’image d’une économie existante et croissante ».
Emmanuel Boyer
« Il semblerait, depuis la pandémie, que les gens consomment leurs vacances autrement », précise-t-il. Si « les éco-compteurs – comme celui situé à proximité de l’entreprise Fontanille à Espaly-Saint-Marcel – n’ont pas encore été relevés », les chiffres atteindraient un niveau sans précédent. Pour preuve, le rectorat de la cathédrale a dénombré 23.540 pèlerins à la messe du matin entre le 1er janvier et le 26 septembre. « Et tous les marcheurs ne vont pas à la messe de 7 heures à la cathédrale. Nous pensons donc atteindre les 40.000 pèlerins à la fin de l’année », poursuit Emmanuel Boyer.
Plus de 23.000 pèlerins à la messe du matin depuis le début de l’année
À titre de comparaison, en 2022, 19.920 pèlerins avaient assisté à la messe. Ils étaient 15.681 en 2019, avant la crise du Covid. « Nous avons eu un printemps exceptionnel », affirment de concert Emmanuel Boyer et les services du rectorat. Fin septembre, le compteur se trouvant sur le chemin affichait, quant à lui, plus de 21.000 randonneurs.
Cette année confirme également le retour des étrangers sur le chemin, avec beaucoup d’Allemands, de Canadiens, d’Américains, d’Australiens, de Néo-zélandais – la Coupe du monde de rugby n’étant peut-être pas sans effet – et même de touristes venus de pays asiatiques. Une présence qui permet aux prestataires d’afficher un grand sourire.
À commencer par La Malle postale qui propose, comme d’autres sociétés en Haute-Loire, de transporter au fil des étapes les bagages des pèlerins et d’aller les chercher grâce à une navette. Depuis le début de l’année, l’entreprise a pris en charge les bagages de 7.250 personnes et ramené 8.500 pèlerins au Puy-en-Velay.
Même constat du côté de Chaspinhac – et plus précisément à Brouss’âne. Depuis quelques années, Virginie Malfrait propose aux pèlerins de partir sur le GR 65 avec un âne. S’adressant à un public familial, la location d’équidés rencontre un franc succès. « J’ai de plus en plus de demandes. J’ai eu beaucoup de Belges d’avril à juin. Le mois de septembre est toujours un peu plus creux pour moi », admet-elle en complétant :
Au début de mon activité, les locations se faisaient à la semaine. Depuis la pandémie, la durée est un plus courte, mais j’ai été obligée de refuser des demandes.
Pour autant, Virginie Malfrait n’envisage pas d’augmenter son cheptel, privilégiant ainsi le contact avec la clientèle.
Au Camino, installé place du For au Puy-en-Velay, à quelques mètres de la cathédrale Notre-Dame, la fréquentation est « très importante. Nous fonctionnons un peu comme un office de tourisme en renseignant les pèlerins ». Là aussi, les Australiens et autre Américains sont nombreux. « Les étrangers reprennent confiance, mais ne sont pas aussi nombreux qu’avant la crise Covid ».
Et parfois, le flux de pèlerins a des conséquences inattendues. « Notre agence postale n’a jamais aussi bien marché, sourit le maire de Monistrol-d’Allier, Olivier Depalle. Lors de la deuxième étape entre Saint-Privat-d’Allier et Saugues, de nombreux pèlerins se rendent compte qu’ils sont trop chargés et décident d’envoyer leur surplus par La Poste ». Des actes qui permettent à la commune de conserver le service public. « Je crois que nous avons l’agence postale qui marche le mieux dans le Haut-Allier », plaisante-t-il.
Les enjeux de demain
Reste que cette augmentation du nombre de marcheurs pose de nombreuses questions. « Les hébergements ont manqué », souligne le directeur de l’Office de tourisme de l’Agglomération en nuançant son propos : « En tout cas, il n’y a peut-être pas les hébergements qui correspondent aux attentes des marcheurs. Le profil des randonneurs a fortement évolué ».
Et c’est l’une des pistes de réflexion sur laquelle l’Office de tourisme travaille. « Nous sommes face à une crise de croissance du Saint-Jacques en ce qui concerne l’hébergement », insiste Emmanuel Boyer. « Dortoir, gîtes, chambres d’hôtes, Airbnb, la diversité est bien là, mais répond-elle vraiment aux attentes des pèlerins actuels ? Il faut trouver des hébergements complémentaires à ceux qui existent déjà et trouver un équilibre », affirme-t-il. Le directeur de l’office de tourisme de l’Agglomération du Puy milite pour avoir des « assises du Saint-Jacques » afin de discuter d’autres pistes de développement avec les différents intervenants.
Car si Le Puy-en-Velay comme ville départ est bien identifié, la ville préfecture de Haute-Loire se situe également sur d’autres itinéraires : Cluny – Le Puy, Lyon – Le Puy ou encore Genève – Le Puy, pour rejoindre Saint-Jacques-de-Compostelle. Moins connus, moins fréquentés, ils ont une capacité de développement importante. « On ressent un certain frémissement pour la voie venant de Genève. Maintenant, il faut l’équipement nécessaire pour la faire rayonner. Nous devons trouver l’équilibre. »
Un important flux de marcheurs qui a aussi des inconvénients
Situé sur le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle, Monistrol-d’Allier a vu cette année de nombreux marcheurs avec leurs avantages et leurs inconvénients.
Certes, accueillir les pèlerins du chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle est une chance pour beaucoup. Les retombées économiques sont importantes. Mais, les marcheurs ne semblent pas toujours respectueux des lieux qu’ils traversent ni « des populations locales. Nous avons eu quelques soucis avec des gens qui ne font pas attention lorsqu’ils traversent la route, qui se sont pris le bec avec des agriculteurs, car ils ne connaissent pas les pratiques. Beaucoup partent également la fleur au fusil, sans carte, sans réserver leur hébergement ou encore en tongs. La semaine dernière, à Rochegude, les secours sont intervenus pour un marcheur sérieusement blessé », indique Olivier Depalle, maire de Monistrol-d’Allier.
Pierre Coupelon, adjoint chargé du tourisme et Olivier Depalle (à droite), le maire. Photo Manuel Cladière
Mais c’est aussi un autre comportement qui heurte l’élu : de nombreux déchets sont retrouvés dans la nature et les toilettes publiques installées sur la commune – utilisés à 90 % par les pèlerins – sont souvent laissées dans un état déplorable. Et Monistrol-d’Allier ne serait pas une exception : « La commune de Vals, entre autres, connaît les mêmes soucis ».
L’accroissement du nombre de marcheurs représente « une manne financière importante » et « on assiste parfois à une course à l’échalote entre les prestataires qui proposent de plus en plus de services comme des sandwichs ou autres ». Si elle n’est pas la seule, c’est aussi, pour l’élu une des raisons de la fermeture de la boulangerie l’an dernier.
Chacun semble vouloir profiter des retombées économiques du chemin de Saint-Jacques. À tel point que « de nombreux panneaux » ont fleuri un peu partout et que les pratiques ne sont pas toujours des plus honnêtes. « Nous avons des retours de marcheurs qui, une fois arrivés à Saugues, se plaignent des tarifs pratiqués par certains hébergeurs. Encore une fois, tout le monde n’est pas à mettre dans le même panier », assure Olivier Depalle.
Manuel Cladière
Quel est le profil du marcheur ?
L’Agence française des Chemins de Compostelle a réalisé, en 2011 une grande enquête via un questionnaire en ligne pour déterminer le profil du pèlerin sur les chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle en France.
Le premier résultat de l’enquête montre que 12 % des cheminants – seulement – partent avec une démarche liée à leur foi. De manière générale, les randonneurs marchent seuls (50 %) – les groupes d’amis représentent 22 % des marcheurs, les couples 18 % et les familles 9 % – et sont majoritairement des femmes (54 %).
En moyenne, les périgrinants dépensent 45,40 € par jour pour l’hébergement et la restauration.
Enfin, l’enquête montre que Le Puy-en-Velay est la ville privilégiée pour rallier Compostelle : 55 % des marcheurs partent du Puy. Les autres voies partent d’Arles, de Vézelay ou encore de Tours.
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