Retour sur le combat de Mick Fouriscot pour sauver la dentelle du Puy-en-Velay

Un demi-siècle après la création du Centre d’enseignement de la dentelle au fuseau, en 1974, coup de projecteur sur une grande dame, qui a sans doute sauvé le patrimoine dentellier du Puy-en-Velay.

Le patrimoine dentellier du Puy-en-Velay lui doit beaucoup. Et pourtant, l’affaire était loin d’être gagnée d’avance pour cette amoureuse des villes chaudes et chaleureuses : « J’ai suivi mon mari, fonctionnaire, quand il a été nommé au Puy en 1971. Mais au bout de 2 mois, je lui ai dit qu’on devait refaire nos valises et partir ».
Mick Fouriscot avait auparavant habité à Madagascar, Djibouti, Nice ou encore Toulouse. « Nous, on venait du soleil. Ici, il faisait froid. C’était affreux, tout était gris. Les trottoirs étaient défoncés. Les commerçants allumaient la lumière quand on entrait et l’éteignaient quand on repartait. Les gens ne vous parlaient pas. Les nouveaux arrivants n’étaient pas considérés. C’était catastrophique ».

Sauver la dentelle du Puy

À deux doigts de plier bagage, celle qui allait devenir l’ambassadrice d’un savoir-faire en cours d’oubli, a fait une rencontre décisive. Une dame lui a proposé de participer à la création d’une antenne de l’AVF (Accueil des villes françaises, accueil du nouvel arrivant) : « J’ai accepté et j’ai beaucoup travaillé dans ce sens. Un jour, je suis passée devant l’immeuble de la Dentelle au Foyer (qui abrite actuellement le tribunal de commerce, NDLR). Je suis entrée et j’ai rencontré un très vieux monsieur, à qui j’ai demandé si l’on pouvait visiter. Il m’a répondu qu’il n’y avait rien à visiter et que la dentelle au Puy, c’était fini : plus d’école, plus de dentellière, plus de commerce ».

Défenseuse convaincue du patrimoine, des traditions et des savoir-faire français, Mick Fouriscot décidait d’agir. Elle se rendait dans les locaux de L’Éveil de la Haute-Loire pour lancer un appel à travers le journal. Une réunion était ainsi organisée avec toutes les bonnes volontés intéressées par l’affaire.

« Je suis aussi allée voir le préfet, le maire et le secrétaire général de la Chambre de commerce, pour leur dire ce que j’organisais ». L’initiative a fait mouche et plusieurs dizaines de personnes se retrouvaient quelques jours plus tard dans l’immeuble de la Dentelle au Foyer : « J’ai pris la parole, pour la première fois en public, en expliquant que, pour moi qui étais étrangère au Puy, il était scandaleux de laisser mourir la dentelle et le passé extraordinaire lié à cette activité. J’ai alors dit qu’il fallait créer tout de suite une association, en demandant aux gens intéressés de rester dans la salle. Il est resté trois ou quatre personnes, avec qui nous avons créé un bureau ». Il a ensuite fallu trouver un président. Et comme il n’y avait pas de candidats, Mick Fouriscot a pris ses responsabilités en acceptant de commander la destinée du Nouveau conservatoire de la dentelle du Puy.
Dans la foulée, elle s’est mise en quête d’anciennes dentellières qui accepteraient d’enseigner. Deux ou trois personnes ont répondu positivement, dont une octogénaire à l’époque.

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Quand les premiers jeunes sont venus pour apprendre, l’association ne possédait rien : pas de fuseau, pas de carreau, etc. À nouveau, c’est par le journal L’Éveil qu’un appel est lancé pour récupérer du matériel : « C’est ainsi que l’on a pu récupérer des objets, souvent sortis des greniers, parfois avec des crottes de souris. Je suis également allée à la décharge publique, où les gens jetaient des cartons. On a commencé comme ça, petitement et sans argent », se souvient Mick Fouriscot.

Mick Fouriscot écrit à Valéry Giscard d’Estaing

Mais au bout d’un certain temps, l’ancien président de la Dentelle au Foyer a trouvé que cette « étrangère » lui « causait du tort » : « Il pensait que j’allais lui fournir des dentellières pour son commerce. Je lui ai répondu que je ne voulais pas que l’on exploite les femmes. Alors il nous a mises dehors ».

Pas découragée pour autant, Mick Fouriscot sollicite le maire du Puy d’alors, Célestin Quincieu, qui lui propose de s’installer dans l’ancien collège technique, aujourd’hui devenu le Conservatoire à rayonnement départemental ou Ateliers des Arts : « C’était très vétuste, on passait un peu à travers les planchers. Mais l’association a pu continuer son activité et même se développer ».

En 1974, Mick Fouriscot, qui ne manque toujours pas d’initiative – ni de culot – écrit à Valéry Giscard d’Estaing, fraîchement élu président de la République, pour lui expliquer ce qu’elle avait fait et qu’il fallait pour la ville du Puy une sorte de manufacture de la dentelle : « Comme 15 jours après je n’avais pas de réponse, j’ai téléphoné à l’Élysée. On m’a indiqué que le président recevait 500 lettres par jour. J’ai répondu que les autres, ça m’était égal et que c’était la mienne qui m’intéressait ».

À force de ténacité, un courrier de la présidence est reçu par le préfet, Max Lavigne. Un dossier est monté. Un inspecteur général est diligenté depuis Paris pour suivre les projets de cette « drôle de dame ». Son rapport sera élogieux.
Peu de temps après, dans son discours concernant la promotion des métiers d’art, Valéry Giscard d’Estaing n’oubliera pas d’inclure la dentelle du Puy et par la même occasion, celle du point d’Alençon.

L’histoire est belle, quand on la regarde avec 50 ans de recul. Mais Mick Fouriscot a dû beaucoup se battre pour arriver à faire revivre la dentelle du Puy sur ses terres. Ce combat inclut des prises de position « révolutionnaires » pour l’époque : « J’ai fait venir un notaire, pour expliquer aux dentellières qu’elles n’avaient aucun droit et que si elles ne faisaient pas attention, leur dot allait filer. J’ai aussi fait venir un banquier, parce qu’à ce moment-là, elles ne pouvaient pas ouvrir un compte bancaire ». Travailleuse farouche, fédératrice hors norme, Mick Fouriscot a finalement passé près de 50 années au Puy-en-Velay : « J’y ai même perdu un mari. Quand il a été nommé ailleurs, je ne pouvais pas tout abandonner comme ça. Du coup, j’ai vécu 40 ans toute seule… »

Voilà la preuve, s’il en fallait une, de l’engagement indéfectible dont elle a fait preuve pour redonner ses lettres de noblesse à la dentelle du Puy-en-Velay. Pas mal pour quelqu’un qui voulait faire ses valises deux mois après être arrivé dans la cité aux fuseaux oubliés…

Cédric Dedieu

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