En Haute-Loire, des mineurs réfugiés attendent d’être scolarisés depuis des mois. En attente d’une évaluation ou de documents, ils ne peuvent pas aller à l’école. Certains d’entre eux sont prêts à aller en justice pour faire valoir leur droit à l’éducation.
Au Puy-en-Velay, l’association RESF (Réseau Education Sans Frontières) tire la sonnette d’alarme. Elle compte à ce jour 25 jeunes étrangers, déclarés mineurs, qui ne sont pas scolarisés. Michelle, membre de RESF, explique leur situation : “Quand ils arrivent au Puy, ils se présentent à la police, la police les envoie à l’ASE (Aide Sociale à l’Enfance, NDLR), l’ASE les met dans un hôtel en attendant qu’ils soient évalués. Actuellement, il y en a 25 qui sont à l’hôtel en attente d’évaluation. L’évaluation, c’est pour savoir s’ils sont mineurs ou majeurs. Et cette évaluation, ça fait longtemps qu’on le dénonce, peut durer 6 à 12 mois. Pendant ce temps-là, le jeune attend. Et pour un jeune adolescent qui a 16 ans, 17 ans, 6 mois, c’est énorme parce qu’il devient majeur entre-temps. De plus, s’il y a une scolarité possible, rater 6 mois, sur une scolarité d’un an ou 2 ans, c’est bien souvent rater sa scolarité.”
Si ces jeunes sont accueillis dans de bonnes conditions, selon Michelle, elle considère qu’ils sont délaissés au niveau de l’éducation : “Il n’y a personne pour s’occuper d’eux, l’éducateur qui est censé s’occuper d’eux les voit une fois de temps en temps.” Le Conseil Départemental, dont dépend l’ASE, se défend : “Nous proposons dans l’attente à certains des cours d’alphabétisation grâce à un bénévole. » Mais cela n’est pas satisfaisant pour Michelle : “L’éducation est un droit. Normalement elle doit se faire dans les 3 mois quand ils demandent une scolarisation. On dénonce cette évaluation qui dure et qui dure et qui dure et, pendant ce temps-là, on ne scolarise pas. L’aide sociale à l’enfance part du principe que les jeunes ne leur sont pas confiés. Ils n’ont pas l’autorité parentale. Mais le texte de loi ne dis pas qu’il y a besoin d’avoir l’autorité parentale pour signer, il faut simplement avoir la responsabilité légale. L’ASE joue sur les mots, sur le fait qu’ils disent tant que les jeunes ne leur sont pas confiés officiellement, donc tant que l’évaluation n’est pas terminée, il n’y a pas d’autorité, de responsabilité.”
Mais selon Michelle, ces jeunes entendent bien faire valoir leur droit à la scolarité : “Il y en a 14 qui se sont rendus spontanément au commissariat car ils voulaient porter plainte contre l’ASE pendant scolarisation. La police leur a expliqué qu’ils dépendaient du tribunal pour enfants, donc ils se sont rendus au tribunal pour enfants. Ils se sont rendus une 2e fois, après quoi l’ASE a inscrit 12 jeunes qui vont aller à l’école. Sauf que ces douze-là, ce sont 12 qui ont été placés par d’autres départements, donc qui ont déjà été évalués. Mais maintenant l’ASE dit qu’il manque les papiers médicaux. Il y a toujours une raison valable pour ne pas scolariser les gamins.” En effet, le Département confirme l’absence de ces documents mais assure que les jeunes seront scolarisé prochainement: “Le Département a actuellement 11 jeunes MNA, arrivés récemment sur notre territoire, confiés par décision judiciaire qui sont dans l’attente d’une visite médicale obligatoire autorisant leur scolarité. Dès réception de cet avis, ils seront intégrés dans un établissement scolaire.”
Quant à Michelle, elle considère que l’ASE ne remplit pas correctement sa mission : “Leur mission est de mettre à l’abri mais ils ont aussi une mission éducative sur les jeunes. C’est dans la loi, donc s’ils ont la mission éducative, c’est qu’ils ont la responsabilité légale. Moi, c’est ce que je dis. Tant que l’évaluation n’est pas faite, le jeune n’est ni mineur ni majeur. Sauf que nous, on dit qu’il y a une présomption de minorité, eux disent qu’il y a une présomption de majorité. Vous comprenez la subtilité. Pour moi, s’il y a doute, le doute doit bénéficier la personne.” Pour elle, le système d’accueil de ces jeunes est injuste : “Qu’est-ce que c’est que cette façon de remettre en question la Constitution pour ne pas scolariser une poignée de gamins ? A quoi ça rime de mettre des jeunes à la rue, sachant que si sur leurs papiers ils sont mineurs mais que l’administration les considère comme majeurs, ils n’ont aucune possibilité d’avenir dans le pays ?” Elle alerte sur les risques de difficultés d’intégration de ces jeunes en raison de ces délais de scolarisation.
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