À 18 ans, Vincent Thévenon se rêvait réalisateur de films. Aujourd’hui, et ce depuis une quinzaine d’années, il exerce son œil d’une autre façon, en ayant repris les rênes de l’entreprise familiale, éditeur de tissus de luxe, Maison Thévenon.
L’histoire commence en 1908 avec son grand-père, qui fait connaître la dentelle du Puy-en-Velay au niveau national grâce à une ingénieuse modernité apportée à l’outil de production. Sa mort intempestive oblige sa femme à prendre sa suite, « une véritable femme d’affaires », se souvient son petit-fils.
Le père de celui-ci, Olivier, fait, lui, connaître la marque dans les univers du design et de la mode grâce à des collaborations avec des artistes. Il invente notamment le peint main : des pièces uniques et résistantes au lavage, « très innovant pour l’époque ».
La marque devient véritablement « éditeur de tissus » dans les années 1980. Vincent Thévenon rejoint l’aventure familiale à son tour, en 2007 : « Mon père m’a fait confiance tout de suite, reconnaît le fils. J’ai fait évoluer la boîte dans l’univers du luxe, c’est le positionnement que je sentais le mieux. »
Les débuts s’avèrent ardus : la marque perd un tiers de ses clients les deux premières années de la reprise. « Tout le monde avait peur, moi le premier, et si nous n’avions pas eu ce côté entreprise familiale, avec un soutien sans faille des uns et des autres, je n’aurais pas pu aller au bout de mon idée. »
« Il a fallu recréer un savoir-faire qui n’existait plus »
Aujourd’hui, Maison Thévenon, toujours localisée au Puy-en-Velay, produit 250 000 mètres de tissu par an et travaille exclusivement avec des professionnels. L’éditeur propose deux collections par an, « très créatives et colorées, selon notre ADN, avec des dessins assez joyeux et des tissus techniques ». La maison a travaillé par exemple avec Dorothée Meilichzon pour Aéroport de Paris, proposant des tissus résistant aux allées et venues de passagers, et qui « en plus d’être techniques, sont beaux ».
Régulièrement, la marque invite des créateurs pour des collaborations. Le chiffre d’affaires de la maison a doublé en six ans. Composée d’une soixantaine de personnes – trente pour la partie éditeur de tissus et trente pour l’atelier –, Maison Thévenon veut garder un côté familial « où tout le monde se connaît ».
Nouveauté enclenchée depuis plusieurs années : la confection – précédemment en Tunisie et en Roumanie – se déroule désormais en France. Les clients demandent de plus en plus du « made in France » ainsi qu’une réactivité et une qualité « que l’on ne peut honorer que si nous avons un outil de production à portée de main », explique Vincent Thévenon.
Il y a six ans, il va donc voir le député de l’époque, Laurent Wauquiez. Aidé par la région et France travail, une MRS (méthode de recrutement par simulation) est lancée : « Il a fallu recréer un savoir-faire qui n’existait plus, ce qui est assez vertigineux, un mélange d’ingénierie moderne et de savoir-faire traditionnel. »
Le but : permettre une productivité et un niveau de qualité optimum grâce aux machines confectionnées sur mesure. « On est reparti de zéro, nos salariés exerçaient d’autres métiers comme fleuriste ou directrice artistique. »
Après un test d’une journée mené par France travail, quinze candidats ont été sélectionnés pour suivre la formation de six mois et intégrer l’atelier : « On n’a eu que des perles, on ne savait pas qui choisir. L’inverse de ce à quoi je m’attendais au début de l’aventure », confesse Vincent Thévenon. La première formation s’est terminée il y a un mois et la seconde session va bientôt débuter.
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